Edito estival 2015 – la fin de la publicité

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On l’a vu récemment avec les annonces chez Gamekult et leurs abonnements premium, la tendance du moment est de parler d’argent sur le web « gratuit », et notamment de pointer du doigt la publicité qui ne génère plus aucun revenu.

Etrange de retrouver une telle phrase d’introduction sur Chroniques-ludiques.fr, n’est-ce pas ? Rassurez-vous, il n’est pas question de compte premium ici, loin de là. Le site restera gratuit quoi qu’il arrive. Non, je voulais surtout vous parler de la publicité, du point de vue de mon humble tribune virtuelle.

Voila quelques années déjà, alors que le site commençait à accueillir de plus en plus de visiteurs et générait un trafic honnête, j’avais mis en place une publicité (Google Adsense, pour ne pas la nommer), espérant ainsi couvrir les frais de domaine et d’hébergement. Ce fut le cas, les frais furent absorbés par les modestes revenus publicitaires. Ces derniers temps, comme Gamekult et bien d’autres sites le mettent en avant, ces revenus ont largement diminué, voire disparu. En connaissance de cause, j’ai tout de même laissé la publicité, au cas où. Jusqu’à aujourd’hui. De toute évidence, les frais de maintenance du site ne sont plus couverts, et la publicité m’agace, de manière générale. Autant que les lecteurs ne soient plus agacés, donc. J’ai alors décidé de retirer la petite publicité Adsense du site.

Pour autant, Chroniques-ludiques.fr ne va pas fermer. Tant pis pour mes économies, j’assume évidemment les frais. Des frais pas si énormes à mon niveau (site amateur), ce qui est à remettre en contexte pour des projets plus ambitieux, voire des sites professionnels. Oui, beaucoup de bonnes adresses ont fermé dernièrement. Faute d’argent donc, mais pas que. Et c’est là où je voulais en venir.

Au fil des années, les sites web proposant du contenu gratuit se sont multipliés, au point de ne plus savoir où porter son clic pour lire des papiers de qualité. Les adresses les plus visibles sont celles qui apparaissent le mieux référencées (SEO), et pas forcément celles dont le contenu est de qualité. En effet, pour être visible il faut écrire en suivant un algorithme assez précis, souvent au détriment de la finesse de la réflexion, car un robot Google n’appréciera pas forcément cet effort. Lui, il veut du factuel. Les sites se sont donc multipliés, avec un SEO d’une perfection absolue, présentant  une énorme quantité d’articles, généralement sans saveur, qui ont eu pour conséquence de noyer dans la masse les sujets plus travaillés. Ces derniers se montrent pourtant nombreux, c’est dire l’abondance de ce contenu « parasite » élaboré dans le cadre du référencement. Le résultat ? Dans cette masse du tout gratuit, de très bons chroniqueurs sont allés voguer vers de nouveaux horizons. Outre le fait que cette multiplication casse les prix des revenus publicitaires (notre sujet de départ, bonjour), elle met aussi un coup à la motivation de chacun. Le temps est une denrée rare, et le passer à tenter de grimper un cran dans Google pénalise celui consacré aux recherches et à la rédaction des articles. Et pour ceux qui préfère écrire correctement que bidouiller les mots-clés, c’est usant. Ainsi, petits blogs et sites réputés ferment, usés par un système frustrant qui ne semble pas récompenser à sa juste valeur un travail de qualité.

A mon sens, la récente démarche de Gamekult fait un pied de nez à ce système. Le site proposant désormais de payer la lecture de sujets de qualité grâce à un abonnement, il fidélise son lectorat. Gamekult n’est plus soumis au moteur de recherche, sa communauté le rémunère. C’est en tout cas une très bonne idée pour se démarquer. A voir sur le moyen et long terme si la fameuse qualité, si l’investigation est vraiment au rendez-vous. Pour exemple (attention à ne pas en faire une généralité), je me souviens d’un article alléchant sur Ulyces, un site de reportages hétéroclites fonctionnant à peu près comme la nouvelle formule Gamekult, qui n’était en réalité qu’une traduction d’un excellent papier paru sur un site américain, accessible quant à lui gratuitement. Je ne vous cache pas ma déception. Cela reste, je l’espère, un cas isolé, mais qu’est ce qui garantit que derrière ces paywalls, ne naissent ou ne naîtront que des billets de fond, du journalisme de haut vol ou des réflexions profondes ? Qu’est ce qui pourrait nous rassurer quant à de futures dérives ?

Si la prochaine tendance est de faire payer la lecture, le phénomène constaté plus haut pour les sites gratuits peut se répéter. Les paywalls vont se multiplier et se noyer mutuellement, et ce modèle commercial, comme le gratuit avec publicité en son temps, risque de devenir moins rentable, à cause de prix tirés vers le bas pour un contenu finalement peu convaincant. Au lecteur de bien choisir ? Au contraire, c’est la porte ouverte aux charlatans et aux bons communicants ! Une fois l’abonnement à tel ou tel site contracté, il me semble plus délicat de se désister que si l’on tombe sur des articles gratuits qui ne plaisent pas, pour lesquels il suffit de fermer la page web et ne plus y revenir. Et les paywalls les mieux référencés, ou ceux aux catalogues les plus aguichants, seront toujours devant d’autres, plus bosseurs mais aussi plus réservés en terme de communication.

Pour résumer, malgré les nouveaux modèles économiques, je ne pense pas que la jungle du web va radicalement changer. En revanche, les communautés vont certainement se renforcer, quitte à s’isoler (un abonné d’un site A n’ira pas forcément s’abonner à un site B, et encore moins à un site C, puis D). J’imagine déjà de gros pôles d’informations payants, auto-complimentés par un soutien communautaire qui ne saurait remettre en cause son investissement, soit l’achat d’un abonnement particulièrement coûteux, engagé sur deux ou trois ans. Evidemment, voila tout ce que je ne souhaite pas voir arriver dans les prochains temps !

 

Bref, voici un édito un peu long pour cette fois, mais qui reflète au moins (et au plus synthétique) le fond de ma pensée. Tout ça pour dire que sur Chroniques-ludiques.fr vous ne verrez plus de publicités. Et si vous n’en voyiez déjà pas, votre séjour ici en sera inchangé. Pour le reste, les articles, que j’espère de qualité suffisante pour vous tenir éveillé plus de trois minutes, resteront ici gratuits et accessibles à quiconque.

 


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