Spec Ops The Line, le paradoxe du jeu de guerre

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Encore un jeu de guerre, me suis-je dit. Encore un jeu de guerre avec de gentils soldats américains qui tirent sur de méchants terroristes. Malgré son nom peu attirant Spec Ops The Line a eu le mérite d’être vendu sur un scénario beaucoup plus travaillé que ses comparses de guerres vidéo-ludiques. Curieux d’un tel traitement pour le genre, j’ai donc installé la bête et débuté l’expérience.

 

Dubaï. Le terrain de jeu est magnifique.
Dubaï. Le terrain de jeu est magnifique.

 

La guerre c’est moche et le feu ça brûle

Malheureusement, c’est sur ce genre de poncif qu’est basée l’histoire de Spec Ops The Line. Bon, avouons-le, ici c’est plus moche que n’importe quel autre jeu de guerre. Mais avec un peu de recul, le scénario n’est quand même franchement pas fou. Le jeu étant très linéaire, c’est assez facile d’anticiper les fausses révélations et, d’ailleurs, les faux choix qui nous sont proposés. Si l’illusion est bien présente et correctement mise en scène pour y croire sur le moment, le choix est en réalité impossible. On ne fait que dérouler un scénario aussi macabre que prévisible.

La guerre c'est moche. Définitivement moche.
La guerre c’est moche. Définitivement moche.

Personnellement, je n’ai vu en Spec Ops The Line qu’un hommage, réussi certes, au film Apocalypse Now. Rien de plus, ou de propre au jeu justement. Après, re-pompe ou réel hommage, c’est selon le sentiment de chacun, mais le fait de vouloir à nouveau regarder le chef d’œuvre de Coppola en jouant à ce jeu m’a conforté dans l’idée d’une profonde déclaration d’amour de la part des développeurs.

Vous ne savez pas encore ce que vous allez trouver à Dubaï.
Vous ne savez pas encore ce que vous allez trouver à Dubaï.

Pour résumer en quelques mots, vous êtes le soldat Walker des forces spéciales et, avec vos deux sous-fifres, vous débarquez dans un Dubaï en ruines, enseveli sous d’incessantes tempêtes de sable. En ces lieux, c’est le 33e régiment qui fait la loi, qui distribue l’eau devenue si rare, avec à leur tête le gradé Konrad. Apparemment ce dernier à pété les plombs, s’est déclaré gourou de Dubaï et a mis en place une sorte de loi martiale / quarantaine où il a la main mise sur les civils et les ressources. Votre mission est d’infiltrer Dubaï et enquêter sur ce bordel. Vous allez évidement y découvrir des horreurs bien horribles. Je vous laisse faire le lien avec Apocalypse Now, le Viêt Nam et le colonel Kurtz, ou le regarder si vous ce n’est pas encore fait. D’ailleurs, petite anecdote au passage, le nom Konrad ressemble étrangement au Conrad, auteur du livre Au cœur des ténèbres qui a inspiré Apocalypse Now.

N'étant pas encore allé à Dubaï, je ne peux dire si les environnements sont fidèles. Je vous tiens au courant pour mon prochain voyage !
N’étant pas encore allé à Dubaï, je ne peux dire si les environnements sont fidèles. Je vous tiens au courant pour mon prochain voyage !

 

La guerre c’est moche mais putain que c’est beau

Si Spec Ops The Line ne montre pas une personnalité tranchée sur son histoire, c’est véritablement sur sa direction artistique où il va s’affirmer. Le jeu est tout simplement magnifique. C’est même certainement un des plus beaux jeux qui m’est passé entre les mains. D’ailleurs, si vous avez des yeux, vous avez déjà dû verser une larme avec les captures d’écran (faites maison bien entendu) ici et là sur cette chronique. Entre les couchers de soleil sur fond de tempête de sable ultra violente, et les superbes panoramas plongeant sur les grattes ciels en ruine de Dubaï, mon cœur chavire. A vrai dire, on m’a vendu le jeu sur son excellent scénario torturé au possible, j’en suis ressorti avec de magnifiques images gravées dans la tête. L’objectif de départ n’est donc pas vraiment atteint, mais pourtant j’y ai découvert de véritables autres qualités, comme cette extraordinaire direction artistique.

Combattre et se déplacer dans une tempête de sable, c'est bon pour l'immersion.
Combattre et se déplacer dans une tempête de sable, c’est bon pour l’immersion.

L’ambiance n’est pas en reste, où massacres s’organisent sous ce superbe déluge chromatique. L’onirisme se mêle habilement aux horreurs contées. Ingénieux, inquiétant, intriguant, Spec Ops The Line l’est vraisemblablement. Il émerveille tout en mettant mal à l’aise, et c’est bien là son point fort. On ne sait jamais sur quel pied danser face au spectacle.

C'est beau.
C’est beau. Mais glauque. Mais beau. Mais glauque. Mais beau.

 

La guerre c’est moche mais c’est relou aussi

Tout n’est pas rose cependant (sauf les captures d’écran), Spec Ops The Line souffre péniblement d’un gameplay, il faut le dire, affreux. Sur les bases d’un bon vieux TPS des familles, on peut tirer, se planquer, courir pour trouver une autre planque, lancer une grenade et, ah non, c’est tout. C’est rigide et peu précis dans les mouvements. On se retrouve souvent à pester sur le placement de notre personnage et ça devient vraiment gênant lorsque l’on doit changer rapidement d’endroit pour esquiver une grenade mortelle. Pas glob.

Classique. Ô grand classique !
Classique. Ô grand classique !

Cependant, ce que je reproche vraiment au gameplay, et plus particulièrement au système du jeu, c’est d’affronter des hordes de soldats ennemis. Des dizaines, des centaines, des vagues toujours plus nombreuses qui se déversent dans environnements au level design toujours plus douteux. Si vous avez cerné le contexte du jeu, vous conviendrez que cela n’a aucun sens. On est dans un huit clos, enfermé dans une ville morte et assoiffée. Là où l’on joue un jeu d’action basique avec des légions d’ennemis, on devrait plutôt jouer la carte de l’infiltration, d’embuscades en tous petits groupes, d’une guérilla intimiste au fin fond de buildings luxueux. On est sensé affronter des soldats aguerris, qui souffrent de l’isolation, de la soif, d’un chef psychopathe, mais pourtant surentrainés et prêt à tout pour survivre.  Les affrontements auraient dû être beaucoup plus réduits, plus difficiles, précis et stratégiques. Chaque exécution auraient dû être une souffrance pour le joueur, un pas de plus vers la folie. On se retrouve en réalité à dézinguer à tout va, en attendant la prochaine horreur (car la guerre, c’est moche, vous l’aurez compris) sous un ciel onirique d’une rare beauté. A mon sens, les concepteurs sont passés complètement à côté de leur propos en conservant ce système de jeu extrêmement standard, mais qui va si bien à tous les autres jeux de guerre.

Le début du jeu nous laisse croire à de petites escarmouches. De la poudre aux yeux, comme cet effet de lumière.
Le début du jeu nous laisse croire à de petites escarmouches. De la poudre aux yeux, comme cet effet de lumière.

 

Je ne boude cependant pas mon plaisir d’avoir découvert ce plus que correct Spec Ops The Line. Malheureusement, il aurait pu être beaucoup mieux. Carton plein sur la forme, donc, et un bel hommage sur le fond même si ça ne vole tout de même pas très haut, mais bon sang que le gameplay est chiant et non avenu ! Ca sera peut-être pour la prochaine fois…

 

Qualités

  • Absolument magnifique
  • Doublages réussies (oui, même la VF !)

 

Défauts

  • Histoire décevante
  • Fort décalage entre le propos et le gameplay
  • Gameplay trop rigide
  • Scripts parfois lourdingues pour avancer

 

Note globale : 3/5

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5 réponses à “Spec Ops The Line, le paradoxe du jeu de guerre”

  1. Bonjour Sylvain,
    Même si ton test semble un peu sévère, on sait maintenant à quoi s’attendre. Si le gameplay était correct, ce jeu m’aurait peut être intéressé. en attendant, je suis sur Remember Me, qui n’a rien à voir et est un jeu d’action avec ses petites teintes de RPG qui ne sont pas là pour me déplaire. je vais en profiter pour publier un test bientôt dessus.

  2. Tiens un avis similaire au mien sur le jeu. D’ailleurs ma critique a été publiée il y a peu sur Archaic si elle t’intéresse Sylvain. Expérience très très mitigée pour ma part aussi, ce Spec Ops.

  3. Je me demande pourquoi, les créateurs de jeux vidéos aiment jouer de leur imagination en créant des guerres. Les jeux sont faits pour qu’on s’y amuse et qu’on s’y détente je crois et non qu’on se traumatise ou qu’on se dégoûte. Franchement, je ne suis pas un fan. J’ai une bonne préférence pour les jeux de courses, aucun crime, aucune tuerie. Mais évidemment tout le monde a ce qu’il aime.

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