Conférences sur les jeux vidéo – festival Stunfest

7 minutes de lecture


Suite au précédent coup de gueule à propos d’une conférence sur les jeux vidéo qui était complètement à côté de la plaque, je n’ai pas voulu rester sur un si mauvais ressenti. J’ai donc écouté quelques autres discussions réalisées dans le même cadre (festival Stunfest) et, heureusement, tout n’est pas à jeter ! Certains sujets se montrent même remarquablement bien traités.

On commence par les deux conférences les plus intéressantes, comme ça c’est fait.

Comment adapter une œuvre littéraire en jeu vidéo ?

Cinq participants, mais grosso modo un seul qui cause, et c’est presque un soulagement en fait tant les autres n’ont pas grand-chose à raconter, si ce n’est sur leurs sujets de mémoire universitaire. Entre un écrivain expérimenté qui maitrise narration et game design, David Calvo donc, et une brochette de scolaires, la prise de parole semble un peu déséquilibré. Soit, ses interventions, hors des sentiers battus, m’ont captivé, rendant ainsi la conférence vraiment intéressante. Du cut-up inattendu aux retranscriptions, réussies ou non, des univers littéraires ou des récits dans les jeux vidéo, le sujet est balayé dans tous les sens.

Le procédural : quel potentiel ?

Bon, je triche un peu car on retrouve l’invité génial du sujet précédent. Et il a une nouvelle fois tendance à beaucoup parler, dans un discours toujours passionné cela dit, mais face à des intervenants qui ne se laissent pas faire ! Le débat est plaisant, et chacun, dans sa spécialité, avance des idées pertinentes, appuyées d’exemples et d’une argumentation plutôt bien construite. On y parle évidemment de procédural (génération de contenu via un algorithme et non d’assets tout prêts) sur l’image, le son, la musique, la narration, ou encore le level design, le tout pendant deux heures. Ma conférence préférée du lot !

Le Narrative Design (partie I)

Le Narrative Design (partie II)

Celle-ci est découpée en deux parties. Entre les deux, on change d’intervenants sans que l’on sache trop pourquoi. C’est dommage car ceux de la première avaient plein de choses intéressantes à dire, ce qui ne semble pas être vraiment le cas des suivants… En fait, dans la seconde partie on se retrouve, comme pour le débat « Comment adapter une œuvre littéraire en jeu vidéo ? », avec ce genre de personnes très scolaires, qui n’ont étudié à fond qu’à peu près un seul sujet. Ici le cas flagrant d’un intervenant ne parlant que de bandes annonces analysées durant son parcours. Des bandes annonces d’ailleurs taillées pour du triple A, soit du bon gros blockbuster, pour un résultat proche, voire identique au cinéma. Nous voilà donc parti pendant une heure à décortiquer les codes des annonces de film. Hors sujet pour ma part, je voulais écouter un débat sur le Narrative Design. Non pas que l’exercice de la bande annonce ne pourrait y trouver sa place, mais il existe des tas d’autres voies d’analyse sur cet excellent sujet !

Ethique et jeux vidéo

Un sujet très vaste, trop peut-être, traité en deux temps. Une première partie, courte mais passionnante, sur l’éthique dans le jeu vidéo au sens game design, c’est-à-dire sur les choix moraux (ou non) proposés au joueur, et sur la possibilité de bien ou mal agir face à une situation donnée. Puis la conférence fait un grand écart vers le sujet sur lequel l’animateur et la plupart des invités voulaient discuter : l’éthique dans le journalisme jeux vidéo. Débat bien classique, sans trop de prise de risque, qui se laisse pourtant bien écouter.

Musique et jeux vidéo

J’ai gardé le pire de la sélection pour la fin, vous m’en excuserez, mais c’est surtout très personnel. Trois heures, dont deux soporifiques – bien que certains propos analytiques sortent du lot – et une de malaise. Une gêne qui se concrétise au travers d’un intervenant qui se lance à cœur ouvert dans une mise au pilori d’un célèbre compositeur de musiques de film : Hans Zimmer. Un massacre sur la place publique, d’une mauvaise foi absolue, avec des extraits de compositions en exemple de son argumentaire, soit trente secondes bien choisies (comprendre abominables et peu représentatives) de morceaux pourtant géniaux dans leur ensemble. Je me suis senti presque insulté d’aimer l’œuvre de Zimmer, tellement l’intervenant en mettait et remettait des couches. Les autres invités, à mon avis aussi gênés que je ne l’étais, n’ont rien dit durant cet interminable monologue, laissant ainsi la tribune à toute cette rancœur malhonnête. Bref, aucun rapport avec la musique de jeux vidéo, ou alors de très loin. D’ailleurs, toute la conférence ne parle pas vraiment de jeux, ou alors de certains titres empruntant beaucoup au cinéma, encore une fois.

On se rend vraiment compte, au travers de ces conférences, qu’il est difficile de parler du jeu vidéo sans toujours se rapprocher du cinéma et de ses codes. Pourtant, si l’on met de côté les grosses productions, le monde vidéoludique possède une vraie personnalité, des caractéristiques qui lui sont propres et qui ne demandent qu’à être ingurgitées, digérées et analysées. Cela demande évidemment un peu de recul, et surtout une connaissance pointue du média. J’ai l’impression, toujours en parallèle de ces conférences à priori représentatives du milieu, que cette expérience, voire cette expérimentation du jeu vidéo, fait un peu défaut à l’argumentation générale, ou chacun préfère finalement se reposer sur des analyses déjà validées et revalidées (le cinéma ou la musique classique, par exemple), plutôt que de se risquer dans le méconnu, quitte à laisser quelques approximations dans le propos, mais au moins la réflexion est lancée. Et c’est d’ailleurs ce que j’ai aimé dans ces conférences, car certains se sont engagés dans cette voie au final. Bravo à vous !

,

5 réponses à “Conférences sur les jeux vidéo – festival Stunfest”

  1. Vache, ça fait un bail que je ne suis plus repassé par ici ^^.

    Merci d’avoir partagé tout ça, je vais jeter une oreille attentive à certaines de ces conférences quand j’aurai un peu de temps devant moi. Une conférence qui aborde le cas de L’Arche du Captain Blood m’intéresse de toutes manières forcément. Ensuite, le format ne joue peut-être pas non plus en faveur de ces conférences : qu’il s’agisse d’une conférence ou d’un podcast, c’est compliqué de maintenir l’attention plus d’une heure (alors trois…).

    Et je te comprends tout à fait pour David Calvo : j’ai moi-même eu l’occasion de le voir en conférence sur la narration vidéoludique aux Utopiales (en 2012 de mémoire), en combo avec Jehanne Rousseau qui plus est. Autant dire que les Assassin’s Creed en ont un peu pris pour leur grade sans que personne ne puisse vraiment les défendre ^^. En tous cas, c’est un intervenant passionné et passionnant qui m’avait fait forte impression à l’époque. (Il y avait eu une captation du début de la conf sur Youtube, faudrait que j’essaye de la retrouver.)

    • Ravi de te revoir ici Hyades !

      Pour ce qui est du format, c’est parfait pour dérouler les trajets « maison-boulot » en ce qui me concerne. Cela dit, 3h c’est trop long, on est d’accord.

      J’avais vu une conférence des utopiales (2012 il me semble aussi, et en vidéo encore une fois, mais je ne la retrouve pas) avec le bonhomme. C’était à moitié en anglais, à moitié en français, bref un beau bordel, mais les idées abordées étaient franchement bonnes. Il en faut des gens comme ça !

  2. Mais où allez-vous chercher tout ce temps messieurs ? 🙂

    Je dois dire que j’écoute aussi pas mal de podcast à droite à gauche, car, comme beaucoup, je fait pas mal de kilomètres chaque jour pour travailler.
    Par contre, pour le format vidéo, je veux votre secret ! Une fois rentré du boulot, et enfin « libre », je ne souhaite qu’une chose : jouer.

    Bref, ce blabla passé, je dois dire que je ne suis pas un fervent adorateur du stunfest et de ses conférences. J’ai l’impression depuis plusieurs années, que ce sont toujours les mêmes personnes qui font les débats et exposent leurs idées. D’ailleurs, je ne sais pas si je suis le seul à avoir cette sensation, mais j’ai vraiment l’impression que ces orateurs, souvent, se voient comme une sorte d’élite culturelle (du jeu vidéo entre autre). Je ne dis pas que c’est mal pour autant, mais je dois dire que je ne m’habitue pas vraiment à ce ton.
    En contre exemple, j’adore les conférences de la GDC, donnant directement la parole aux créateurs. Les post-mortem surtout (certains sont disponibles au format écrit sur le site gamasutra) sont vraiment passionnant. Dommage qu’il n’y est pas une initiative de la sorte pour mettre à l’honneur les créateurs francophones…

    • Le secret ? Rien de plus simple, tu convertis la vidéo youtube en mp3 et tu écoutes ça comme un podcast 🙂

      Je comprends complètement ton point de vue sur le ton, d’ailleurs ça m’a valu un bon coup de gueule (cf. le lien interne en début d’article). Et je suis aussi complètement pour laisser la parole aux créateurs, d’ailleurs j’ai vu que Radiokawa va lancer demain une nouvelle émission à ce propos : http://www.radiokawa.com/nouvelle-emission-la-dev-team/

      A surveiller, comme d’hab !

      • Haha effectivement, de ce point de vue là 😉

        Oui, j’ai vu ça aussi. J’en attends beaucoup d’ailleurs, car même si « In dev with » est sympathique, ça ne rentre pas vraiment dans les détails de la création/ du développement. A voir si « la dev team » comblera mes attentes.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *